Pourquoi en veut-on à Julian Assange ?
Grande période de fragilité institutionnelle, cet article du Chicago Tribune, qui critique Julian Assange de manière exagérée et odieuse, montre à quel point il devient courant dans la presse quotidienne, soit-disant professionnelle, d'évoquer la mort physique, psychologique ou sociale, de son adversaire. A l'activisme de droite présent aux USA répond l'activisme de gauche en France dans le même ordre d'idée, celui de la conservation de sa bonne vieille société.
Peut-on classer Julian Assange parmi les "gens de gauche" ? je le crois, je ne le crois pas.
Peut-on classer Julian Assange parmi les "gens de gauche" ? je le crois, je ne le crois pas.
Peut-on croire que Wikileaks fasse partie de la tradition de l'activisme. Certains le diront mais ce ne serait pas exact, car nous sommes loin du vernis idéologique.
On a par exemple la Sunlight Foundation ou Mediapart dont le projet est de faire continûment pression sur le pouvoir en reliant des données visibles entre elles pour monter des dossiers à charge qui masquent leur légèreté de contenu et de réflexion par le temps d'attention limité dont dispose l'internaute. Ceci a bien été expliqué par Lawrence Lessig dans son dernier essai sur les dangers de la transparence nue et des bricolages idéologiques malsains qu'elle autorise.
La brèche ouverte par Julian Assange et les bénévoles qui l'assistent est d'une autre nature ; certes il s'agit de faire pression sur les décisions du pouvoir mais en ouvrant un stock brut de données semi-confidentielles et de le rendre disponible pour examen ultérieur.
Wikileaks ne veut attaquer des personnes en particulier (Bush ou Obama) ou mener un combat politique national (anti-sarkozysme) dans l'espoir de toucher prébendes et postes lors de la prochaine élection, mais vise la prise de conscience même des élites et d'une manière transnationale : la Russie et l'ONU demandent des enquêtes sur ces matériaux.
Julian Assange n'est pas à ranger dans la tranche des provocateurs de métier comme Edwy Plenel qui voit le mal partout, mais un provocateur par les situations qu'il établit. Je dirais presque malgré lui.
C'est une différence de taille, car il sonne des réveils plus profonds que ceux dont on est capable de s'entretenir au café du commerce.
La démarche initiée par Wikileaks donne à voir et non pas à imaginer. Elle demande un effort de compréhension du matériel ainsi que d'un vrai positionnement dans l'actualité. C'est pour cela qu'elle est moins efficace pour rameuter la population sur le violon du poujadisme de gauche, si bien incarné par Jean-Luc Mélenchon aujourd'hui, et quelle écarte toutes les tentations vibrantes de voir du complot partout.
Elle se situe non sur le terrain de la preuve, mais sur celui des faits. Il s'agit non de juger, mais de permettre à la société d'observer calmement et froidement ses propres hypocrisies dans le miroir.
Sur ce chemin, Julian Assange risque se faire beaucoup d'ennemis et d'envieux, dans tous les camps idéologiques. Car il s'agit plus d'une démarche philosophique que d'une volonté propagandiste qui est à l'oeuvre.
C'est la fragilité de tout pouvoir, même celui de la contestation, qui est ici révélée.
Bonne continuation et bon courage à lui.
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