Twitter ou l'effet KISS

Si vous ne savez pas encore ce qu'est Twitter, je vous remets entre les mains de l'auteur de cet article.
Eric Schmidt ne manque pas d'humour pour avoir qualifié Twittter de "service du messagerie du pauvre." Surtout qu'il aurait adoré voir ce concept naître dans les laboratoires de Google.
Là où il est dans le vrai c'est que le concept de Twitter n'est pas celui du micro-blogging (on a lu cela en effet sous la plume de commentateurs rapides), mais celui d'un service de messagerie réduit à sa plus simple expression. Un quasi-cousin du SMS.
La force de Twitter se trouve dans la définition d'un équilibre entre fournir un service de messagerie et d'alerte complet et son format d'existence minimal. Dans ce cas l'équilibre a été rompu au profit de la simplicité d'emploi, notamment au niveau de l'enregistrement et de l'identification qui sont sommaires, et au niveau de l'offre de service, pas plus de 140 caractères.
Le directeur de Google devrait être pourtant au courant, la référence à ces outils viraux et minimaux, il connaît bien, un exemple est la simplissime page d'accueil de son moteur de recherche.
Il est donc parfaitement au courant et ce qu'il laisse entendre comme faiblesses de ce systèmes de messagerie constitue en fait sa force première. Son commentaire est donc à lire comme une forme d'hommage inversé aux créateurs et utilisateurs de Twitter.
A mon avis Twitter ne se laissera pas impressionner et continuera à suivre l'exemple de son grand frère, ne pas complexifier une application, quitte à développer d'autres offres autour, renforçant le modèle de base par une présence accrue, sans l'alourdir, ni le corrompre...
Curieux, comment les principes informatiques empruntés à la philosophie d'unix deviennent vecteurs de succès pour les applications en ligne.
  • Ici nous avons le KISS ("Keep It Simple Stupid !") à l'oeuvre, qui peut s'interpréter comme une forme de baiser de la mort à la concurrence lorsque cette dernière a cédé à la surinflation fonctionnelle, qui se traduit sur le Web non par la mort des autres, mais par de nouvelles connexions, de nouveaux usages, de nouvelles interactions, une nouvelle richesse créée.

  • Une autre particularité est empruntée aux projets Open Source : ce n'est pas le concepteur de l'application qui est réellement à l'origine du sens donné à la création, mais l'emploi des utilisateurs qui en font le retour définitif d'expérience.Pour ceux qui aiment les concepts artistiques on pourrrait faire référence au fait que ce n'est pas la forme qui introduit le regard mais l'espace laissé entre les formes ou  que la beauté soit une expérience unique née de la rencontre d'une oeuvre et d'une personne, une expérience individuelle collectivement partagée.

Voici un nouveau succès de plus sur l'Internet à mettre au compte de la pensée technologique, ce qui devrait faire réfléchir nos communicants et consultants médias antiques (ainsi que ceux qui les emploient), qui par la logique de l'habitude et de leur métier croient et ont toujours cru dans le pouvoir de formatage et d'éducation des masses.
Je suis capable de comprendre qu'un message cohérent est préférable à pas de message du tout, mais le manque de plasticité de celui-ci au point qu'il ne donne pas à réfléchir, qu'il ne provoque pas l'action, qu'il soit même invasif, le rend inatractif et peu mobile sur le Réseau.
Le fait de laisser l'utilisateur libre et de donner sens par sa participation à l'outil est une des clés du succès assuré sur les réseaux.Twitter n'a jamais donné de conseil d'utilisation, ni donné consigne sur un emploi légitime ou illégitime de son outil.
Dernière remarque, mais que penser alors de l'attitude de Facebook qui vient de copier le système Twitter ?
Globalement, je pense que Facebook est devenu un aspirateur de la réalité Web, pour construire en vase clos le site de Facebook, un monde imaginaire relationnel. Facebook n'est pas en prise sur le Web, c'est un contact différé, une expérience à part, un monde immersif à l'image des MMORPG ou plus exactement de Second Life. Ce genre de modèle comporte toujours un risque, celui de se heurter comme AOL/Compuserve l'ont expérimenté face à l'arrivée d'Internet, à la concurrence d'une plateforme plus ouverte, réactive et donc attractive sur le long terme, le Web, lui-même.

Ce qui suit est un avis très personnel, prenez le comme tel.
Google a du être soulagé de l'impossibilité d'un accord de rachat de Twitter par Facebook, car Twitter renforce naturellement l'attrait pour le Web, et ce rachat aurait peut-être signifié la mort du service Twitter par l'intégration de ses équipes de développement au projet Facebook.
Google n'a pas pour raison de vivre d'intégrer toutes les expériences positives du Web, il n'en a nul besoin.
Son service fondamental est d'être la signalisation du Web, et la figure d'un Web réactif et concurrentiel en renforce le besoin chez les utilisateurs et par conséquent assure sa perennité.

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