Cyberdémocratie, en chantier...
Bien que l'article soit de qualité, je suis à l'inverse de ses positions. Ceci pour les raisons suivantes.
Premièrement, instituer un contrôle.
Contrôle sur les représentants ou les intermédiaires constitués. Donc si nous laissons entendre que tout ce que nous avons besoin pour l'avenir est de contrôler, nous pérennisons la figure des intermédiaires même si nous les affaiblissons.
D'autant plus que nous n'avons pas exactement besoin de l'Internet pour exercer un contrôle citoyen opérant.
Deuxièmement, si la démocratie participative n'a pas fonctionné jusqu'à présent, elle ne fonctionnera pas ou elle est utopique.
Là, il y a globalement un manque de compréhension sur la place de la technologie dont la première caractéristique est d'être plastique, c'est à dire de s'adapter aux emplois qui lui sont demandé.
N'ayons pas non plus, une vision obscurantiste de la technologie qui l'associerait à une "essence négative", c'est un construit humain et rien d'autre. Il n'y a pas d'opération magique dans la transformation de nos vies (un spécialiste de ce genre de visions est Nicholas Carr) .
Je dirais que nous commençons tout juste à apercevoir le début des outils qui seront nécessaires à l'installation de la démocratie participative. Que nous ne les connaissons pas encore, puisque nous sommes encore en peine de les imaginer.
D'ailleurs peut-être que les premiers essais ne naîtrons pas chez nous, en Europe, mais dans des territoires hypermodernes et connectés, comme la démocratie a commencé d'oeuvrer dans une communauté restreinte mais qui pouvait penser à son devenir, et ou le théâtre et l'Agora se sont révélés vecteurs d'opinions.
Je pencherais plutôt pour des premières expériences dans des territoires à la population limitée, qui n'ont pas un background historique très en faveur de la démocratie représentative, du moins aussi prégnant qu'en Europe. Donc moins de force de résistance culturelle à leur emploi.
Dans le futur, je verrais bien des premiers essais de démocratie participative dans des territoires comme Singapour, Taïwan, Honk Kong ou la Corée du Sud, pourquoi pas les Emirats Arabes Unis, et ceci à base d'outils que nous connaissons à peine organisant les jeux d'interactions entre les citoyens.
Car si nous pensons le devenir d'une démocratie participative, il faudra bien arriver comme dans une assemblée par des règles à limiter et construire l'interaction de chaque type d'acteur pour pouvoir disposer de décisions élaborées dans le respect d'un équilibre.
Un des premiers équilibres est le temps que les acteurs ont à consacrer à la vie connecté, qui n'est pas le même pour chacun.
Une grande part des processus seront défini directement dans le code des applications participatives en ligne, de manière à ce qu'au moins les problèmes dus aux déséquilibre engendrés par la diversité des situations et des pouvoirs soient adressés a priori.
Dans les premiers essais, il n'y aura probablement pas de telles négociations préalables, mais par le jeu des tests et erreurs, les problématiques décisives apparaîtront et seront corrigées.
Le cas des premières offres de participation en ligne auxquelles nous sommes en train d'assister, me semblent plus être une comédie de ce qui est à venir qu'autre chose : ouvertures de forum libres sur des sujets sans grosse contrainte au niveau de la participation, et modération a posteriori pour éviter la foire d'empoigne, ce qui n'est pas de la cyberdémocratie mais du spectacle Web, organisé par des consultants en communication politique.
L'approche sera complètement différente et devra être négociée avec les acteurs, s'il s'agit de transformer ces outils partisans en autre chose que de l'entertainment politique au niveau symbolique (important certes, mais ne nous attendons pas pour le moment à plus.)
Dernier aspect, concernant le méta-débat sur loi Hadopi, le problème identifié par Versac n'est pas comme il l'a présenté un problème de stratégie, mais un problème institutionnel.
Comment penser qu'un mouvement d'essence participative sur le réseau puisse être bien accueilli par des institutions représentatives et d'opinions qui ont comme mécanisme principal d'action et de correction de la réalité le lobbyisme et le sondage ?
Lobbyisme non uniquement orienté par de grands groupes mais aussi par des associations qui se sont déjà infiltrées par la loi dans nos habitudes et moeurs quotidiennes et qui s'occuperont bientôt de ce que nous mangerons dans notre assiette, pour notre supposé bien être (même l'Internet n'est pas encore arrivé à ce degré d'imposition sur l'intime).
Et finalement, comment penser qu'un système institutionnel qui commence à prouver son inefficacité en matière de production de loi, puisse reprendre progressivement contact avec la société réelle par de nouvelles stratégies, alors que rien n'a jamais été fait pour repenser les système d'interactions. Le même contexte institutionnel reproduira les mêmes incompréhensions.
Le premier pas vers la cyberdémocratie devra être un effort sur nous-mêmes, de changer nos rapports de pensée avec technologie et d'être capable de juger si une offre telle que l'Iphone ou le Kindle est bonne pour nous à court, à moyen ou à long terme.
Si nous sommes incapables de penser les projets ou risques de société auxquels de simple produits connectés sont associés, ce n'est même pas la peine de croire que nous sommes matures pour une réflexion sur la cyberdémocratie.
Elle mettra plus de temps pour se manifester, c'est tout.
Elle mettra plus de temps pour se manifester, c'est tout.
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